8 ans qu’on attendait un disque d’Onus, 8 années qu’on se disait qu’il ne pouvait pas n’y avoir qu’un seul album, ils ne pouvaient pas nous laisser sans rien proposer de nouveau.
On a bien fait d’attendre. Parfois la patience est une alliée puissante et pleine de gratitude, surtout quand on s’y attend le moins…
Ok Lambda de quoi qu’on parle ici ?
Tout d’abord j’ai envie de vous poser quelques questions. Je me demande, la musique cet art mineur peut elle faire du cinéma, peut elle faire de la littérature. Peut elle développer un récit, une histoire, peut elle se montrer assez explicite pour porter un message, soutenir une réflexion ?
C’est choses auxquelles je crois se retrouvent dans la musique dont je vais vous parler maintenant, parce que cette musique vaut traité de philosophie, elle égale tout ce que vous pouvez percevoir par vos 5 sens, elle stimule votre esprit, elle vous plonge dans une histoire.
Tout d’abord il faut replacer les choses dans leur contexte : Qui sont Nicolas Van Meirhaeghe (Empusae) et Peter Bjärgö (Arcana) les deux protagonistes d’Onus ?
Nicolas Van Meirhaeghe (alias Sal-Ocin) est belge et il est le magicien génial du sound design le plus pointu et sombre qui soit dans l’univers musical terrestre. Son travail est littéralement de la matière noire baignée de lumière. Vous voyez ce pigment « noir » qui ne reflète rien, cette suie qui absorbe tous les photons qui s’y aventurent ? Si Van Meirhaeghe était un peintre il peindrait de larges paysages avec ce noir précisément et il l’éclairerait avec des lumières de la puissance du soleil. Si vous l’avez suivi au cours de sa carrière vous savez qu’il est un explorateur et qu’il à toujours porté des messages et des thèmes compliqués à aborder, singuliers et résistants à l’approximation. Les addictions, la souffrance, la solitude, la beauté de l’amour pur, la cruauté humaine dans toutes ces dimensions.
Sa musique est tendue comme un arc, affutée comme une lame de bistouri, forte et puissante comme un tsunami qui déferlait dans votre pré carré, bousculant vos préconçus, vos avis emporte-piècés, nos travers humains les moins recommandables. Ses structures rythmiques sont absolument fantastiques et d’une complexité sans égal, mêlant la répétition d’un tambour shamanique aux circonvolutions des basses fréquences qui viennent porter et magnifier toutes les structures qu’il construit tel un architecte sonore. Mais ce n’est pas tout, Van Meirhaeghe à un sens absolument incroyable de la mélodie. De belles mélodies incroyablement ciselées et évolutives, qui naissent et se renforcent. Au fil de sa discographie, si on lui accorde le temps d’une émotion, on comprend les rouages qui le caractérisent et le rendent si unique dans le paysage de l’électronique expérimentale et de la Dark Ambient.
Son projet principal “Empusae” nous tient tous ses fans et fidèles en haleine depuis presque 20 années mais Van Meirhaeghe est aussi le pilier d’Ordo Rosarius Equilibrio, Tzolk’in (duo avec le Français Gwenn Trémorin aka Flint Glass dont l’évocation est quelque part dans ce site) et “Onus” dont nous parlons aujourd’hui.
Alors “Onus” c’est quoi ? C’est la rencontre absolument fusionnelle entre Van Meirhaeghe et Bjärgö. Mais alors qui est-ce ?
Peter Bjärgö est suédois, lui c’est plus de 30 ans de carrière, plus de 25 albums sortis au travers de ses différents projets et sous son nom au cours des 10 dernières années et avant 2003 quand il s’appelait Peter Erebus ou Peter Pettersson avant son mariage avec la très talentueuse Cécilia Bjärgö.
C’est, pour ceux qui le connaissent, un album absolument mythique sorti en 1997 dans le genre Folk Médiévale, Cantar De Procella, le deuxième opus d’Arcana qui reste encore aujourd’hui le disque de chevet de nombreux musiciens électro et c’est une voix absolument inimitable, sa voix, grave et aérienne, tonale et envoûtante. La musique de Bjärgö est une invitation au rêve, un radeau en perdition sur des vagues de mélancolie, des accords envoûtants et des atmosphères tribales et médiévales aux limites de la trance.
Je vous dépose ce soir dans deux albums et je vous laisserai ensuite toute la liberté de creuser plus précisément là où vous voudrez dans le travail de ces deux magiciens.
Je vous emmène d’abord dans le dernier album qu’il ont nommé “ONUS” comme le nom de la formation qui les avait rassemblé 8 ans auparavant. Le sujet de cet album est intimement lié à l’actualité et relate les folies de l’humanité dans son histoire passée et présente. Les plus vils côtés de la nature humaine sont traités avec un prisme qui conjugue les orientations artistiques de Peter et Nicolas. Cet album est incroyablement puissant et complexe, je ne peux que vous inviter à l’aborder au travers d’une écoute attentive et isolée afin de saisir tout le spectre sonore de cet album.
ATTENTION : je dois vous avertir : Ce disque n’est pas un simple disque, il faut en être conscient il va vous emmener dans une histoire absolument effroyable.
Je ne peux que me permettre de vous en faire une lecture partielle car ce n’est pas l’exercice de cette chronique mais il s’agit bien d’un monde qui est devenu fou, il s’agit bien de l’évolution rampante des forces du mal qui envahissent dans le premier morceau tout l’espace de vie et de joie de cette humanité, déjà perdue mais qui cherche à être combative et qui va se préparer à faire la guerre à contre cœur dès le second morceau et qui décide de faire des sacrifices pour des jours meilleurs après. Le troisième morceau est le plus bouleversant, la guerre éclate et les forces s’affrontent dans cette horreur qu’est la lutte armée mais tout à coup, un drone absolument glaçant s’empare de toute la scène sonore. Un fou à lancé les bombes et l’holocauste nucléaire détruit tout sur son passage. Le moment est absolument glaçant mais il porte un message. Le dernier morceau, ce sont les rayons du soleil qui perce l’hiver nucléaire, sur les survivants qui doivent tout reconstruire, comme si l’histoire n’était jamais comprise, comme si nous ne retenions jamais rien des erreurs du passé.
Vous voilà avertis.
Ensuite je vous pose sur le dernier de Nicolas Van Meirhaeghe (Empusae – Pilgrimage to Ganriki), ou Nicolas évoque son pèlerinage à Kyoto au Japon où il à gravi lors d’une marche longue et éprouvante le Mont Inari en haut duquel se trouve un sanctuaire d’une divinité Shintoïste qui est supposée guérir les maladie oculaires. A la frontière entre un récit cinématographique et une expérience mystique dans laquelle il à investi toutes ses ressources physiques et mentales. Si vous creusez vous trouverez le sens de sa transcendance et vous comprendrez que le souffle de guérison ne vient pas d’une divinité ou d’une croyance mais du chemin qu’il faut accomplir pour la trouver.
Vous n’imaginez pas à quel point tout cela résonne dans ma tête et je vous souhaite d’en toucher autant que possible la signification en vous proposant le deuxième album de cette chronique qui prends fin ici,
En vous disant,
Prenez soin de vous.